Eau : un équilibre à rétablir: "Eau : un équilibre à rétablir
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Kazimir Olechnowicz, Président-directeur général de CIMA+
Édition du lundi 20 juillet 2009
Mots clés : Institut économique de Montréal, Pierre Gingras, Exportation, Eau, Québec (province)
Le débat sur l'exportation de l'eau soulevé la semaine dernière par l'Institut économique de Montréal (IEDM) devrait intéresser quiconque est préoccupé par l'avenir économique du Québec. En effet, que l'on soit ou non d'accord avec le projet spécifique de l'Eau du Nord proposé par l'ingénieur F. Pierre Gingras, la prochaine grande richesse à exploiter au Québec sera l'eau. Pas simplement l'eau en tant que force hydraulique permettant de produire de l'énergie, comme on s'en sert depuis plusieurs décennies, mais bien l'eau en tant que substance à consommer et à utiliser.
On a beau vouloir se fermer les yeux et prétendre que l'eau est un patrimoine sacré auquel il ne faut pas toucher, les pressions vont aller en augmentant et ce débat aura inévitablement lieu.
Valeur de l'eau
En effet, la plupart des études qui se penchent sur l'impact du réchauffement planétaire prédisent que les précipitations de pluie et de neige vont probablement s'accroître dans le nord du continent, alors qu'elles vont diminuer dans le sud. L'eau du Nord, pour reprendre le titre du projet de M. Gingras, va donc devenir relativement de plus en plus abondante et prendre de la valeur.
Pendant ce temps, les populations du sud -- et pas seulement nos voisins américains, qui ont les moyens de développer des solutions de remplacement, mais aussi des populations très pauvres et vulnérables du Tiers Monde -- vont être de plus en plus touchées par le «stress hydrique», pour reprendre le jargon courant. C'est-à-dire que la demande pour l'eau dépassera les ressources disponibles.
Allons-nous simplement nous croiser les bras, nous asseoir sur nos gigantesques ressources et dire aux habitants du reste du monde de se débrouiller avec ce qu'ils ont? Et ce faisant, laisser passer une gigantesque occasion de profiter de cette ressource naturelle dont nous sommes si bien pourvus? Est-ce la solidarité planétaire qu'on veut mettre de l'avant?
Les pluies abondantes des dernières semaines, qui ont gâché les vacances de bien des gens, ne devraient pas nous faire oublier que le problème nous touche aussi. Le niveau des Grands Lacs par exemple baisse depuis plusieurs années sans qu'on sache trop pourquoi. Et les changements climatiques risquent d'aggraver cette situation, ce qui aura inévitablement des répercussions sur le Saint-Laurent.
Que préfère-t-on? Subir les effets écologiques, économiques et humains d'une baisse des débits chez nous, ou bien utiliser les surplus d'eau qui vont s'accumuler au nord -- avec, bien sûr, toutes les précautions nécessaires pour limiter l'impact sur l'environnement -- pour compenser cette baisse?
Certaines personnes préoccupées par l'environnement souhaitent garder le sujet tabou par peur de briser un équilibre naturel qui serait inhérent à la situation qui prévaut aujourd'hui. Elles devraient comprendre qu'au contraire il ne s'agit pas de briser un équilibre, mais de contribuer à le refaire.
Rétablir l'équilibre
Qu'on le veuille ou non, l'être humain fait partie de la nature. La demande des humains pour l'eau va surtout augmenter dans le sud. Les changements climatiques -- qu'ils soient ou non principalement une conséquence de l'activité humaine -- vont quant à eux probablement diminuer la quantité d'eau disponible au sud et l'accroître dans le nord. Ces surplus d'eau vont simplement se jeter dans la baie James et en fin de compte dans la mer, alors qu'on craint justement une hausse du niveau des mers.
Pourquoi ne pas chercher des façons de profiter de cette situation en rétablissant au moins partiellement l'équilibre? On pourrait soutenir que c'est la position la plus écologique à adopter, bien plus que celle qui propose de ne rien faire.
Il existe de nombreuses façons de tirer profit des ressources hydriques abondantes du Nord, celle mise de l'avant par l'IEDM et l'ingénieur F. Pierre Gingras étant une parmi bien d'autres. L'important est d'ouvrir le débat et d'au moins considérer la possibilité de faire les études pertinentes. Le bien-être et la prospérité futurs des Québécois -- mais aussi de nombreuses autres populations -- pourraient bien dépendre de ce que nous déciderons de faire à cet égard."